Ghjilormina racontait
des légendes, le soir, quand elle était sûre
que, désoeuvrés, enfin, nous l'écoutions paisiblement.
Sa voix vibrante et chaude recomposait des fragments d'histoires
mille fois entendues, mille fois répétées.
Elle ponctuait ses phrases de courts silences, introduisant de légères
variations dans ses leitmotive.
L'âme ancestrale du feu palpitait dans ses yeux ponctués
d'infîmes éclairs, illuminant son visage pâle
et fin comme papier à musique.
Je l'écoutais des heures durant le regard perdu au fond de
ses yeux noirs pendant que les chataignes rôtissaient doucement
entre les braises. Entre les flammes dansaient d'étranges
images : dragons et diablotins ricanants et grimaçants.
Et je courais alors sur des pistes de songes que les flammes de
l'âtre projetaient sur les murs.
La maison, tout à coup, c'est une bulle qui monte dans la
fumée !
Construction fragile et soudain si légère. Je voyais
les murs s'éloigner, les ombres se dilater, pendant qu'apeuré,
fasciné, je suivais le fil ténu d'une nouvelle aventure.